• Voici deux des lettres envoyées à Monsieur Diard, authentique paysan de son état. A travers celle-ci vous devinerez aisément à quel genre de personnage je m'adresse et vous comprendrez mieux la raison pour laquelle j'emploie ce ton si singulier avec lui. 

    Monsieur Diard est un ami de très longue date que je respecte pour son authenticité, sa simplicité, son bon sens, sa finesse. Il m'a inspiré l'histoire intitulée "Un rêve éveillé" (voir mes excellents textes sur ce présent site). J'assure souvent à Monsieur Diard que c'est un poète qui s'ignore. Mais je crois qu'il ne connaît pas le sens du mot "poète"... Heureuse indigence du pâtre qui donne toute sa fraîcheur, son originalité, son charme à ce véritable représentant de la chouannerie. Car Monsieur Diard est un Chouan qui vit au vingt-et-unième siècle. Dans la mentalité, l'accoutrement. Avaricieux jusqu'à l'extrême, à l'écart de toute mode, nourri à la spartiate (à base de pain douteux, de lait caillé, de fruits tombés des arbres), Monsieur Diard est un cas exceptionnel pour notre aseptisée société de consommation. Chez lui il n'y a pas d'horaire, pas ou peu d'électricité, pas d'eau courante, pas de contrat écrit, pas de toilettes, pas de moteur, aucune machine de quelque sorte que ce soit si ce n'est une antique bicyclette rafistolée au petit bonheur la chance. Monsieur Diard ne jure que par le travail à mains nues, la grosse soupe, le pain, le feu dans la cheminée et l'eau de pluie ruisselant sur son toit, qu'il boit sans faire de manière, avec laquelle il se rase. Cette pluie parfois glaciale qui lui arrose le visage dans ses champs... L'outrance poussée jusqu'à la poésie fait tout l'attrait de cet homme. Il est âgé de 80 ans. C'est un paysan dans l'âme. Pardon ! Un Chouan.<o:p></o:p>

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    Cher Monsieur Diard,<o:p></o:p>

    Cette lettre pour vous dire que nous allons bien et que la nouvelle année 2002 est enfin arrivée cette année. Comment allez-vous mon cher Seigneur ? Comment va votre maison ? N’est-elle pas malade ? Isabelle et moi nous attendons avec grande impatience de vous revoir, cher ami.<o:p></o:p>

    J’espère que vos vaches ne pondront pas d’oeufs cette année et que vos poules ne donneront pas de lait. Il vaut mieux que ça soit le contraire, n’est-ce pas ? J’espère que votre vélo n’est pas en panne d’essence. Avec le remplacement du Franc par l’Euro, on ne sait plus où on en est dans nos comptes. Heureusement qu’on a encore jusqu’au mois de février pour payer encore en Francs. Le pain de Crissé a-t-il le même goût lorsque vous le payez en Euros ?<o:p></o:p>

    Cette année il faudra encore élire un nouveau Président de la République comme il y a sept ans car on n’est plus au temps des bons rois de France. Allez-vous voter pour ce cher Chirac ? Si Chirac est réélu cette année, on n’aura pas un nouveau Président de la République. Ca sera le même qu’avant, alors à quoi ça sert de voter ? Ca va user encore du papier pour rien, puisque Chirac est déjà au pouvoir… Enfin c’est comme ça, on n’y peut rien.<o:p></o:p>

    Il pleut ici. Et par chez vous, pleut-il ? La pluie c’est quand même bien pour faire pousser des betteraves dans les champs, mais à Paris il n’y a pas beaucoup de champs de betteraves me direz-vous. C’est vrai. Mais il pleut quand même. Ca serait bien si au lieu de faire pousser rien du tout on faisait pousser des pommes de terre à Paris. On devrait remplacer les maisons et les voitures de Paris, qui je vous le rappelle est la capitale de la France, par des champs de tournesols. Ca serait beau. Et pis ça rapporterait des sous au propriétaire des tournesols. Ca serait bien si, vous Monsieur Diard, vous étiez propriétaire des tournesols qui pousseraient à Paris. Vous seriez un homme riche.<o:p></o:p>

    Allez, je vous dis au revoir et à bientôt Monsieur Diard. N’oubliez pas de regonfler les roues de votre vélo et de donner à manger à Mesdemoiselles vos vaches. Couvrez-vous bien et travaillez pas trop quand même.<o:p></o:p>


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    Très cher Monsieur Diard,<o:p></o:p>

    Bien le bonjour Monsieur Diard. Je vous écris cette lettre parce que nous sommes revenus de voyage, Isabelle et moi, et le temps des cartes postales est révolu. Ici en région parisienne le temps est plutôt de saison : un peu frais le matin, et encore beau, ma foi, la journée. Il n'y a pas beaucoup de vaches dans la ville, en revanche, il faut bien l'avouer, il y a beaucoup de circulation automobile, un peu trop à mon goût d'ailleurs. Mais enfin, c'est ainsi, on ne peut rien y faire...

    J'espère que vous lirez ma lettre avec plaisir, parce que j'ai pris la peine d'acheter un timbre à mes frais. Vous allez me dire que trois malheureux petits francs, ça ne va pas chercher bien loin, mais quand même, il faut les sortir de la poche. Enfin, le principal c'est que le courrier arrive en temps et en heure.<o:p></o:p>

    Isabelle va bien. Moi aussi je vais bien. J'espère que vous allez bien également, comme ça tout le monde sera content d'aller bien. C'est ça je crois qui est important. Je vais peut-être aller voir les parisiens à Paris, puisque je suis à côté de Paris. A six kilomètres à vol d'oiseau pour tout dire. Mais je ne pourrais pas y aller en volant, puisque, comme tout le monde le sait, moi Raphaël Zacharie de Izarra je ne suis pas un oiseau. Je n'ai rien d'un oiseau d'ailleurs. Alors je devrais, pour y aller, prendre la route, comme tout le monde. Mais par la route la ville de Paris se trouve, non plus à six kilomètres mais à plus de dix ! Comme quoi il vaudrait mieux parfois être un oiseau plutôt qu'un automobiliste, c'est plus avantageux pour certaines choses. Mais, me direz-vous, si J'étais un oiseau et non pas un automobiliste, il ne me viendrait pas à l'idée de traverser la ville de Paris, qui est la capitale de la France, pour aller voir les parisiens...<o:p></o:p>

    Non, si j'étais un oiseau, je demeurerais à Colombes pour manger les miettes de pain dans la rue, lesquelles miettes de pain et rues sont nombreuses en cette ville de la banlieue parisienne. Donc, même si Paris se trouve à six kilomètres à vol d'oiseau, j'emprunterai la route sur plus de dix kilomètres pour rejoindre cette belle et grande ville de la France. Ca n'est pas marqué "pigeon" sur mon front, que je sache !<o:p></o:p>

    A part ça, ça va bien ici. Le matin le soleil se lève, et le soir, comme tous les soirs d'ailleurs, il se couche. Moi aussi je me lève le matin et je me couche le soir. Sauf quand je dors le matin, et que je veille la nuit. Les nuits sont faites pour dormir, et les journées pour aller et venir sous le soleil qui brille ou sous les nuages qui pleuvent. On ne peut rien y faire, c'est ainsi. Pourtant il m'arrive de dormir sous le soleil qui brille ou sous les nuages qui pleuvent et d'aller et venir sous les étoiles et la lune qui brillent la nuit, parce que le jour je suis fatigué et la nuit j'ai envie d'aller me balader sous la Lune. Ca arrive. Alors que vous, vous Monsieur Diard, je sais que la nuit vous dormez (ronflez-vous ?) et le jour vous vous adonnez au plus sain des labeurs dans votre ferme et sur les routes de la campagne sarthoise.<o:p></o:p>

    J'espère que le facteur de Crissé, qui doit être très gentil pour distribuer ainsi le courrier aux gens sans que ceux-ci ne lui demandent rien, vous apportera pareillement cette lettre, même si vous ne lui demandez pas la veille qu'il vous l'apporte. Mais enfin, il faut avouer que le timbre que J'ai collé y est pour beaucoup dans cette affaire.<o:p></o:p>

    C'est commode d'avoir un facteur sous la main pour qu'il nous apporte ainsi des lettres que l'on ne demande pas. S'il n'y avait pas de facteurs, il n'y aurait plus besoin de boîtes aux lettres dans les maisons. Plus besoin de lettres non plus. Plus besoin de timbres. Plus besoin d'enveloppes. On s'écrirait sans papier, sans enveloppe et sans timbre. Ca serait quand même moins onéreux.. Alors pourquoi ne pas rénover le système ? J'ai envie d'alerter le Ministère des Postes et Télécommunications pour lui faire part de mon idée. Et puis on pourrait étendre le système de la poste sans enveloppe et sans timbre au téléphone : on supprimerait le téléphone, les lignes et les poteaux téléphoniques, les annuaires, les cabines téléphoniques et les centres techniques, afin de téléphoner sans téléphone. Ainsi je pourrais vous appeler de Paris sans payer un seul centime ! Ca serait quand même mieux que le système actuel, qui nous oblige à avoir un téléphone et à payer la communication quant on veut parler à distance avec quelqu'un... Et puis il y a l'abonnement à payer aussi... Tout cela est vraiment trop cher et trop compliqué. Mais qu'y peut-on ? C'est Chirac qui décide à notre place, puisque c'est lui qu'on a élu. Il fallait élire quelqu'un qui propose de supprimer les timbres et le téléphone. Maintenant il est trop tard, il faudra attendre la prochaine élection présidentielle.<o:p></o:p>

    Pour ma part, si j'étais Président de la République Française, je supprimerais tous les feux rouges, et je les ferais remplacer par des feux verts permanents, afin que plus jamais les voitures ne s'arrêtent inutilement dans les villes à dépenser de l'essence qu'on paye cher pour faire du sur-place. Une voiture c'est fait pour avancer, alors pourquoi les pouvoirs publics s'obstinent-ils à placer des feux rouges qui stoppent les voitures dans les villes ? C'est bien pour embêter le monde qu'ils font ça !<o:p></o:p>

    Je ne vais pas vous prendre votre temps plus longtemps Monsieur Diard, et je vous dis au revoir en cette lettre. Nous viendrons peut-être ce week-end, j'espère. Bonne journée, bonjour à vos bêtes, bien le bonjour à l'Evêque du Mans si vous le voyez dans les parages faire du vélo, on ne sait jamais.

    VOIR LA VIDEO :

    http://www.dailymotion.com/video/x1uon0d_seconde-lettre-a-monsieur-diard-raphael-zacharie-de-izarra_webcam

    Monsieur Diard :

    http://www.dailymotion.com/video/x1h17q_monsieur-diard_creation

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  • - Hé la Fanchon, ramène un peu ta grosse culasse que je l'y pète à grands coups de crogne !

    - Ha ! Ce cher Alphonse. Vous ne changez décidément pas mon bon ami. Toujours aussi impatient à ce que je vois. Dois-je vous rappeler pour l'énième fois que nous ne sommes point encore mari et femme, et qu'en vertu de cet état de fait je ne saurais consentir au moindre hyménée avec vous, dût-il être à l'état de simple évocation ?

    - Qu'est-ce que tu dégoises encore là, la gueuse ? T'as vu mon gros sauciflard ? Et pis t'as vu ton gros cul ? Et ben figure-toué que j'avions envie de me la taper ta grosse culasse de pute-à-cul ! C'est pas pus compliqué que ça. Arrête donc de causer comme une bourgeoise endimanchée, hé, trivache à la con ! Viens donc là que je te saute la crapiole, sale truie de mes deux !

    - Mon cher Alphonse, votre parler m'est parfois un peu abscons... En effet, je n'entends guère les propos que vous me tenez ici avec tant d'insistance... Mais que me racontez-vous là au juste ? De quoi est-il question pour que vous vous mettiez dans un tel état ?

    - Hé, parbleu, j'avions envie de me farcir ton gros cul de pouffiasse pardi ! Tu comprends donc pas que tu me fais durcir le sauciflard avec ton gros cul et que j'avions une sacrée envie de le faire dégueuler au fond de la matrice mon gros saucisson ? Même qu'y l'a un os dedans, tellement qu'y l'est dur c'te salopiau de canon de chair à baise de putain de mes deux ! Et pis arrête donc de faire des manières, pasque sinon je vas te cracher mon purin dans la gueule, qu'après ça tu causeras comme une enflure de fumelle de putain de couille-à-vache de bouseuse de fille de ferme !

    - Ho ! Je crois comprendre mon doux Alphonse ! Vous avez envie de procréer chrétiennement avec moi, c'est cela n'est-ce pas ? Ho ! Comme vous êtes charmant : vous voulez que je vous donne le premier fruit de notre amour... Un charmant petit qui vous ressemblera, sans doute. Vous êtes si impatient de donner la vie. Comme je vous comprends ! Mais attendez encore un peu Alphonse. Attendez que le prêtre nous passe l'anneau au doigt.

    - Passer l'anneau au doigt ? Tu rigoles la Fanchon ! C'est ma grosse saucisse que je vas te foutre dans le cul, oui ! Et pis tu vas bien me la faire dégorger, ma tripe ! Dans ton boyau à fumelle tu vas me la faire dégorger, hein la Fanchon ?

    - Certes Alphonse, certes. Je vais tout de suite vous chercher quelque saucisse accompagnée d'un peu de laitue puisque vous me semblez si affamé. Mais diantre ! Que ne pouviez-vous me dire plus tôt que vous aviez si faim ? L'émotion à l'idée d'une future paternité sans doute.

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  • Le son des pas du cheval dans la plaine me fait songer à chaque étoile que compte le ciel de ma longue nuit. Lorsque je foule la poussière des chemins, c'est toujours vers le firmament que se tournent mes regards.

    Tous les astres du monde sont logés dans mon coeur comme autant de larmes ou d'émeraudes, selon que je suis triste ou plein de joie. Je porte en moi les chagrins les plus secrets, les plus futiles de l'univers. Mais je sème aussi les lumières les plus pures dans les coeurs. En quête d'un amour que je suis seul à concevoir, je parcours le monde depuis des siècles en infatigable rêveur, trouvant la force de durer à travers les âmes pures. Ma jeunesse est intacte, préservée par des siècles de vertu.

    Mon souci n'est pas l'or, ni le temps, ni la mort qui effraie tant les hommes, mais l'amour, la beauté, la poésie. Aussi, je ne puis mourir : l'infini est mon compagnon de route. Loin de vos lois, je règne en souverain sur vos nuits, vos songes, l'imaginaire.

    Parfois on me tend la main sous la Lune : je prends la forme d'un paysage, d'un feu follet, d'une chandelle. Là, j'apparais dans mon ineffable vérité.

    Je poursuis ma route la tête dans les constellations à la rencontre des âmes pures.

    Je suis un fou d'amour, un spectre, une flamme traversant le temps, accroché à des incarnés. Je voyage d'âme en âme. L'être dont je possède le souffle aujourd'hui est l'auteur de ces lignes que vous êtes en train de lire.

    J'ai pris possession de lui et je prends la parole à travers sa plume.


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  • J'erre entre ciel et poussière dans la solitude et le silence, le regard perdu dans les étoiles, le coeur plein de mélancolie. J'allonge le pas sous une nuit éternelle, sur un rivage infini : mon pied est léger, mon coeur est lourd, et mes larmes s'évaporent comme de l'éther dans l'espace. Mon chagrin a le prix des choses inconsistantes : je pleure pour rien du tout.

    Je suis affligé, inconsolable, perdu. Je n'ai plus de joie, et mon infinie tristesse est cependant ma raison de vivre. La blonde veilleuse est mon asile : je suis PIERROT LUNAIRE.

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  • Lorsqu'un jour j'ai vu passer cette ombre, touchante de modestie, de grâce voilée, mon coeur blasé s'est ému. C'était une infante créature à la vitalité déchue, un papillon aux ailes brisées (elle était invalide, claudicante, et c'était en Turquie en 93).

    J'ignorerai pour toujours le nom de cette fleur blessée, si pâle, dont la détresse apportait à ses membres frêles, à son regard, à ses traits inquiets une grâce bouleversante. Ainsi cette vision confirmait ma sensibilité pour les vierges exclues, ces femmes flétries par la vie, jeunes et déjà fanées. Les demoiselles vulnérables sont plus dignes que leurs soeurs satisfaites d'être la cause d'une esthétique émotion, l'objet des émois les plus recherchés. Elles sont attentives aux tendresses, aux délicatesses que recèlent les choses les plus ordinaires. L'amour en elles prend des allures magistrales, parce qu'il est porté à des hauteurs inédites.

    Les amants les plus doués mériteraient ces coeurs laissés dans l'ombre : ce sont des trésors qui gisent dans des coffres ternes. Mais les amants les plus doués -qui choisissent toujours les plus flatteuses conquêtes- s'ennuient bien vite dans les bras de leurs quiètes grâces.

    Je sais que le coeur n'a point d'éloquence quand il s'agit de défendre des causes entendues, trop évidentes. Rien de superbe, en effet, dans les amours convenues, millénaires, universelles de deux êtres symétriques. Nul panache entre Roméo et Juliette. Le sublime ne vient qu'avec Cyrano.

    Comme les plus beaux chants, selon Musset, sont les plus désespérés, les plus émouvants visages de femmes ne sont-ils pas ceux que la beauté a dédaignés ?

    La joliesse qui a refusé de s'incarner chez une jeune fille donne plus de prix à son coeur avivé, sensibilisé, aiguisé par la détresse. Il est certes aisé de conquérir ces coeurs en ruine, mais comme il est délicat d'affiner sa sensibilité à la mesure de leur affliction ! Conquérir n'est rien. Cultiver est un art bien difficile. La conquête est peu de chose. Ce qui compte, c'est la moisson. Et celui qui de la terre ne voit que la surface, dédaignant ses sillons profonds, ne fera rien surgir des champs conquis si facilement. Je veux aimer dès aujourd'hui à ma façon : avec envergure, noblesse, courage, déraison, profondeur et science. Avec tout l'art de mon coeur éclairé.

    Je veux arracher toutes ces filles meurtries à leur sort infâme pour leur ouvrir l'âme à ma réalité amoureuse, qui est poétique et cruelle, sereine et féroce, subtile et grotesque. Je désire non seulement marquer leur coeur au silex d'un amour esthète, mais encore les cautériser au fer rouge de mon nom. Je suis le virtuose du sanglot, le musicien du soupir, le violoniste de la douleur.


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